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Derrière les grilles, la prison veut ouvrir des portes

Des détenus qui s’entraînent à passer un entretien d’embauche, des prisons qui s’appellent désormais « établissements de réinsertion active » : l’Administration pénitentiaire (AP) affiche sa volonté de promouvoir la réinsertion professionnelle, un vrai défi aujourd’hui porté par les associations.

« Bonjour, je m’appelle Karim, je recherche un emploi dans le bâtiment. » A la maison d’arrêt de la Talaudière, près de Saint-Etienne, ce détenu de 28 ans condamné pour divers vols commence à préparer sa vie d’après.

Titulaire d’un CAP plâtrerie/plaquiste, c’est parce qu’il a écrit des lettres de motivation à l’administration pénitentiaire qu’il a pu intégrer un cursus de suivi professionnel en prison. Après des ateliers CV, communication, il a passé cette semaine des entretiens à blanc avec des chefs d’entreprise avant de se rendre à un forum Pôle emploi à Saint-Etienne.

« C’est une chance, je ne pensais pas qu’en prison ce genre de choses existait », souffle-t-il. Sa sortie de prison est prévue en 2017.

Éviter la « sortie sèche », à savoir la libération brutale du détenu sans aménagement de peine ni projet de réinsertion, est devenu l’un des leitmotiv du monde judiciaire et pénitentiaire consacré par la loi Taubira, avec en ligne de mire la lutte contre la récidive.

Statistique abondamment reprise et discutée : 63% des personnes sortant de prison sans aménagement de peine font à nouveau l’objet d’une condamnation dans les cinq années qui suivent leur libération, selon une étude publiée en 2011.

Incarcéré pour tentative de vols, Franck, 26 ans, abonde : « la dernière fois, je suis sorti de prison le dernier jour de ma peine, sans rien. Le premier jour, tu es content d’être dehors, de voir ta famille et tes parents mais après, c’est compliqué de voir l’avenir ».

Les associations qui oeuvrent en partenariat avec les services pénitentiaires d’insertion et de probation (Spip) ou les missions locales insistent sur le travail de dentelle nécessaire pour accompagner dans ou vers l’emploi les personnes détenues ou faisant l’objet d’une peine alternative.

- Faible niveau de qualification -

Elles relèvent en premier lieu le faible niveau de qualification des condamnés. En 2014, selon des informations recueillies auprès d’environ 51.000 personnes, 43,4% étaient sans diplôme et les trois quarts ne dépassaient pas le niveau CAP.

La prospection des entreprises, la mise en réseau sont également fondamentales mais « la lourdeur du temps judiciaire ne correspond pas nécessairement au temps de l’entreprise, très réactif », relève Paul Goutry, le référent emploi de l’association Justice 2e Chance (J2C) qui intervient en Ile-de-France et en Rhône-Alpes.

Les attentes, l’accompagnement diffèrent aussi selon les profils des personnes « sous main de justice ». « Pour une majorité, le travail, ça va être justement comment raccrocher au travail », relève une responsable associative. « Qu’est-ce que c’est que gagner le Smic quand on a été dealer à 3.000 euros par jour ? »

« Ce qui fait que ça marche, c’est la motivation et un bon contexte familial », note Soraya Occulto, conseillère pénitentiaire d’insertion et de probation (CPIP) dans la Loire.

Les bâtiments pénitentiaires se mettent aussi au diapason avec l’arrivée de nouvelles prisons. Programmés par la loi pénitentiaire de 2009, les établissements de réinsertion active (ERA) accueilleront leurs premiers détenus d’ici la fin de l’année, à Valence, Riom (Puy-de-Dôme) ou encore Beauvais.

« Une prison reste une prison, c’est la privation de liberté », souligne Hugues Belliard, directeur de l’ERA de Valence. Mais l’infrastructure (des cellules individuelles, luminosité, etc.) doit permettre d’atteindre le principal objectif du nouvel établissement : « préparer la sortie et rendre dynamique le parcours d’exécution de la peine ».

« On a amélioré les conditions de vie des détenus avec cinq heures d’activités au minimum. On a développé le lien social avec des espaces dédiés à la préparation à la sortie », détaille M. Belliard.

Reste que pour l’instant, les chiffres sont timides avec seulement 18.709 personnes (sur quelque 65.000 écroués détenus) suivies par un des 145 conseillers Pôle emploi intervenant en prison en 2013, selon des données du ministère de la Justice. Seuls 5.000 ont obtenu une solution de réinsertion pour leur sortie.

AFP

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